La SCIC Les 3 Colonnes, invente un nouveau type d'accompagnement et de maintien à domicile : « le Viager Solidaire ». Cette Société Coopérative d’Intérêt Collectif, développée par Sébastien Tchernia et Frédéric Lacaze depuis octobre 2013, se montre très précurseur dans son domaine.
La Société a pour objet principal de se porter acquéreur des biens immobiliers des personnes âgées qui le souhaitent, sous forme de viagers occupés afin de leur offrir une aisance de vie indéniable, via le versement d'un capital initial et d'une rente mensuelle, la détection au plus tôt, des situations de dépendance, et l'accompagnement du maintien au domicile par la mise en place de services.
Sylvie Bretones : Pourquoi avoir choisi la forme juridique de la SCIC ?
Sébastien Tchernia : Les enjeux sociaux et l’existence de besoins liés au développement durable, à l’action sociale et aux services de proximité posent la nécessité d’une approche collective dans la recherche de réponses adaptées. Ils amènent les partenaires économiques, institutionnels, associatifs à coopérer à la création d’une nouvelle forme d’entreprise : Société Coopérative d’Intérêt Collectif. Une Société Coopérative d’Intérêt Collectif est une structure à vocation altruiste, qui positionne l’enjeu économique au service de l’action sociale. Cette forme de coopérative est issue de l’article 19 de la loi du 10 septembre 1947. Son mode d’organisation interne prend en compte les intérêts des différentes parties prenantes pour permettre à chacun une implication sous forme de coresponsabilité. La SCIC Les 3 Colonnes a pour objet de permettre et de faciliter le maintien et le soutien à leur domicile de personnes âgées en perte d’autonomie, financière ou sociale. La SCIC favorise le lien intergénérationnel en orchestrant pour le mieux-être des bénéficiaires un dispositif humain centré sur les services à la personne, les soins et l’éveil aux nouvelles technologies.
SB : Comment fonctionne votre modèle ?
ST : La singularité du fonctionnement coopératif permet de casser le lien unitaire entre le vendeur et l’acheteur d’un viager classique, comme dans le cas où l’acheteur est un fonds d’investissement (et où le « pari sur la mort d’autrui » devient aléatoire). Mais, dans notre cas, une fois les biens libérés, les bénéfices de revente sont réinvestis au profit d’autres bénéficiaires.
Ce cycle vertueux est garanti par le fonctionnement démocratique au sein de la coopérative, par la limitation de la rémunération des parts sociales, et par l’affectation obligatoire des excédents aux réserves impartageables. De ce fait, la SCIC se veut un outil de mutualisation intergénérationnel, au service de l’intérêt collectif de ses parties prenantes.
La vente des biens permet de payer les rentes des personnes qui vivent le plus longtemps, de réaliser des plus-values permettant l'aide d'autres personnes âgées, de rembourser les financeurs.
Depuis 2016, la SCIC permet aux collectivités locales de financer des biens, ce qui a pour effet non seulement de développer le logement social, car une fois le bien libéré, la collectivité le réaménage pour en faire un logement social, mais aussi de donner du sens à l’opération viagère pour la personne âgée, son logement devenant « utile », lors de la succession. La SCIC a dans cette même optique développé le Viager Intergénérationnel. Dans ce cas, elle s’engage au décès à céder le bien pour permettre l’accession à la propriété d’un ménage modeste.
SB : Vous vous démarquez par beaucoup d’innovation sociale. Avez-vous aussi d’autres caractéristiques particulières ?
ST : Contrairement aux offres de viager immobilier classiques, la SCIC les 3 colonnes intervient uniquement en cas de besoin financier avéré et évalue le besoin avant d’évaluer le bien immobilier. Elle souhaite être en mesure d’accompagner la personne âgée à tous les niveaux de ses besoins, que ce soit pour la stimulation physique, la nutrition ou les soins à domicile, et passe des partenariats avec des associations qui partagent les mêmes valeurs, comme par exemple Siel bleu pour l’activité physique. La SCIC a ainsi vocation à favoriser le diagnostic précoce de la fragilité, évaluer l’habitat pour permettre l’aménagement et limiter les risques liés à la dépendance, soulager les aidants afin de faciliter le maintien à domicile, mettre en relation les seniors avec des services d’aide à domicile, créer ou maintenir le lien social et rompre l’isolement et la solitude, et promouvoir l’utilisation du viager solidaire comme un outil social.
Après une expérience de 15 années passées dans la gestion de fonds pour compte de tiers, Sébastien Tchernia s’est interrogé sur notre façon de produire et d’être vis-à-vis du monde, et a profondément modifié son approche et sa sensibilité aux alternatives économiques.