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Quels enjeux pour la Silver économie ? Interview de Jean-Hervé Lorenzi

Sylvie Bretones : Quelle est votre analyse macro-économique de la Silver économie ?

Jean Hervé Lorenzi  : Tout d’abord, j’aimerai faire un triple constat :

Aujourd’hui, nous n’avons pas d’idée de l’ampleur du développement des maladies dégénérescentes dans les années à venir.

 

 

L’Etat, les départements et organismes publics financent d’ores et déjà de façon explicite 20 milliards d’euros par an. Ce montant est à augmenter d’une dizaine de milliards d’euros si l’on prend en compte l’aide informelle des aidants.

Enfin, la Silver économie reste à développer et nous ne savons ni dans quel sens, ni dans quelle magnitude son développement influencera l’emploi.

Mais attention, l’avancée en âge n’est pas la dépendance. Moins de 10% des plus de 60 ans sont dépendants, ce chiffre passe à 35% pour les plus de 80 ans mais ne cesse de s’améliorer au fur et à mesure des progrès médicaux et d’une meilleure qualité de vie des seniors.

Nous ne connaissons pas encore le potentiel de l’offre ou de la demande de la Silver-économie.

Trois points méritent ici d’être évoqués :

  • A ce jour, les solutions permises par les nouvelles technologies pour assurer la mobilité et l’autonomie restent très marginales, même si nous pouvons anticiper que les robots les favoriseront très fortement ;
  • Quelles seront les opportunités offertes par la liquéfaction du marché immobilier ? En effet, de nombreux seniors perçoivent des revenus faibles mais disposent d’un patrimoine immobilier. Comment pouvons-nous monétiser en partie ce patrimoine ?
  • Enfin, au sein du secteur de la Silver économie, il faut poursuivre la qualification des aidants, en particulier dans le secteur des Ehpad et des services à la personne.

 

SB : Malgré ces interrogations, comment faire ?

JHL : Avant tout, il faut s’assurer que les gens de grand âge sont bien pris en charge. La première contrainte à lever est celle du financement, incluant les besoins en formation des personnes qui vont travailler dans ces filières. C’est à la collectivité d’organiser ces filières.

Nous voyons bien aujourd’hui un bouillonnement, une Silver économie qui doit se développer mais qui compte tenu de sa maturité, reste encore éloignée de l’importance de ces sujets. Les difficultés sont avant tout sur la qualité de service et donc le financement des Ehpad ou le coût de l’APA pour les départements …

L’approche globale doit donc d’abord être macro-économique en répondant aux besoins de financement. Cette approche doit ensuite intégrer une démarche d’innovation.

La décision sans cesse remise sur cette question du financement devient nécessaire. Va-t-on rendre l’assurance dépendance obligatoire à partir de 40 ans ? Je crains qu’il faille un fait générateur, un phénomène conflictuel, comme une grève longue dans les Ehpad pour pousser à cette prise de décision et éviter que collectivement, nous allions dans le mur.

 

SB : Un mot de conclusion ?

JHL : Nous devons dépasser le rythme ternaire structurant notre ancienne société industrielle, qui dresse des ponts entre les différentes générations, qui les rassemblent au lieu de les opposer, autour d’une promesse qui pourrait être « une seconde chance tout au long de la vie », pivot de l’équité intergénérationnelle. Une définition dynamique de cette équité intergénérationnelle, suppose perspective et promesse, soit l’espérance d’avoir, pour chaque génération, une trajectoire de vie qui s’améliore dans le temps. Une formulation ambitieuse car elle renvoie à ce qui fait l’homme, à ses besoins essentiels pour vivre, de l’éducation à la protection, des projets et du travail aux garanties vieillesse et dépendance…..

 

Jean-Hervé Lorenzi est Président du Cercle des Économistes et président du pôle de compétitivité Finance Innovation. Il est aussi vice-président d’UBS holdings France et titulaire de la Chaire « Transitions Démographiques, Transitions Économiques ». Il a été conseiller économique du Premier ministre et directeur général de CEA Industrie.

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